Le traitement d’un sujet n’appelle pas un plan unique. S’il est indispensable qu’il y ait un plan et qu’il soit bien conçu, sa forme reste secondaire.
Un devoir doit toujours être divisé en parties ; c’est la condition minimale d’un plan. Il y a deux grandes sortes de plan : le plan par thèses et le plan par étapes. Le plan par thèses consacre une partie à chacune des thèses soutenues, opposées l’une à l’autre ; l’ordre d’exposition des thèses est en général peu important. Le plan par étapes enchaîne des parties qui se suivent et dont l’une doit nécessairement précéder l’autre, sous peine d’incohérence.
Pour le sujet « La réalité est-elle rationnelle ? », un plan par thèses devra examiner la thèse selon laquelle la réalité est toujours rationnelle et la thèse selon laquelle la réalité est parfois irrationnelle. L’ordre de l’examen importe peu.
En revanche, pour le sujet « Jusqu’à quel point connaître implique-t-il de douter ? », un plan par étapes examinera les questions suivantes dans l’ordre suivant : faut-il recourir au doute pour connaître ? quel doute favorise la connaissance, quel doute la sape ? le premier doute entraîne-t-il le second et, si oui, quels sont les critères qui permettent de reconnaître que le doute va trop loin ? La réponse à chacune de ces questions étant indispensable pour répondre à la suivante, il faut les traiter dans l’ordre.
À l’intérieur d’une partie du plan par thèses, il faut ranger les idées par étapes ; à l’intérieur du plan par étapes, il faut les opposer par thèses. Ainsi, la dissertation se fait toujours par thèses et par étapes.
Dans la première partie d’un devoir sur « La réalité est-elle rationnelle ? », soutenant la thèse « la réalité est toujours rationnelle », on pourra trouver les étapes suivantes :
Pour le sujet « Jusqu’à quel point connaître implique-t-il de douter ? », la première partie proposée (quel doute favorise la connaissance, quel doute la sape ?) opposera les thèses suivantes : le doute est indispensable à la connaissance, le doute ruine toute connaissance.
En théorie, les deux types de plan conviennent pour tous les sujets. Le plan par thèses semble plus simple, dans la mesure où son organisation générale est donnée par le sujet ou par l’histoire de la philosophie ; néanmoins, c’est à l’intérieur de chaque partie que votre réflexion se fera sentir, puisque vous devrez organiser une progression entre les idées et construire un raisonnement. Le plan par étapes dispose le raisonnement à l’échelle de l’organisation générale du devoir et semble plus difficile ; mais, à l’intérieur de chaque partie, la construction est plus simple à réaliser. Il n’y a donc pas réellement de plan plus facile à suivre lorsque l’on cherche à faire un bon devoir.
Cependant si, déjà pris par le temps, vous devez vous contenter d’un devoir passable, choisissez le plan par thèses ; il sera plus facile de donner l’apparence d’une progression par étapes à l’intérieur de chaque partie qu’à l’échelle du devoir tout entier.
Si vous avez rattaché le sujet à plusieurs problématiques imbriquées les unes dans les autres (voir séquence 3), chacune d’entre elles pourra sûrement faire l’affaire pour organiser une partie ; le plan par étapes est alors tout indiqué.
Le plan par thèses est le plus célèbre des plans philosophiques ; on l’appelle aussi plan « thèse-antithèse », « thèse-antithèse-synthèse » ou encore « plan dialectique ».
Les deux parties d’un plan par thèses sont toujours faciles à trouver, puisqu’elles découlent immédiatement de la problématique, voire du sujet lui-même.
Dans un sujet comme « La connaissance scientifique peut-elle seule atteindre la vérité ? », une partie sera consacrée à la thèse « la connaissance scientifique est seule à atteindre la vérité », une partie à la thèse « d’autres connaissances que la science atteignent aussi la vérité ».
Les problèmes du plan par thèses commencent avec la recherche d’une troisième partie : que doit-on y dire ? Le sujet nous semble toujours épuisé par les deux premières parties. D’une façon générale, doit revenir à une troisième partie toute idée qui n’entre ni dans la première ni dans la deuxième. Si vous n’avez qu’une idée dans ce cas, gardez-la pour la conclusion ; si vous en avez trois, montez-les en une troisième partie ; si vous en avez deux, cherchez plus encore pour en trouver une troisième. Trois idées sont un minimum pour élaborer une partie.
Retenez cependant que, d’une façon générale, une troisième partie n’est pas obligatoire ; votre devoir sera cependant meilleur si vous en rédigez une. À partir des niveaux supérieurs à celui du baccalauréat, les trois parties sont quasiment obligatoires.
Chacune de vos parties s’articule autour d’une grande idée ou thèse ; vos idées secondaires seront autant d’arguments en faveur de votre thèse ou de réfutations de la thèse contraire. Marquez à côté de chacune de vos idées dans quelle partie la placer ; celles qui restent, s’il en reste, constitueront une troisième partie. C’est en réfléchissant sur les idées qui restent que vous chercherez quelle grande idée les rassemble : alors vous connaîtrez la thèse de votre troisième partie.
Où placer les idées qui sont des réfutations d’argument de la thèse opposée ? D’une façon générale, vous pouvez indifféremment les ranger dans l’une ou l’autre des deux premières parties ; si vous disposez d’une réfutation de chacune des deux thèses, vous pouvez les placer en troisième partie, pour renvoyer les deux thèses dos à dos, mais il faudra une troisième idée pour compléter votre dernière partie.
Il faut chercher à construire un raisonnement en autant d’étapes que d’idées disponibles. Essayez de créer une progression d’une idée à l’autre, qui donne l’impression de partir d’un commencement que tout le monde admettrait, pour aboutir à une conclusion qui procure le sentiment d’en savoir plus : du plus connu au mieux connu.
Si vous n’arrivez pas à ranger les idées selon un raisonnement, à défaut il faudra les ranger de l’idée la plus simple et la plus évidente à l’idée la plus complexe et la moins évidente ; n’oubliez jamais qu’une étape est toujours la condition de compréhension de celle(s) qui sui(ven)t.
Comment ranger une réfutation à l’intérieur d’une partie ? Tout dépend en réalité de la valeur que vous prêtez à cette réfutation. Dans le cas où elle vous semble convaincante, vous procéderez de la manière suivante : si la thèse réfutée est la première soutenue (première partie), placez la réfutation à la fin de la première partie ou au début de la seconde ; elle fera transition ; si la thèse réfutée est celle de la deuxième partie, vous placerez la réfutation à la fin de celle-ci ou au début de la troisième (si vous avez une troisième partie). Dans ce dernier cas, vous aurez renvoyé dos à dos les deux thèses opposées, ce qui est déjà un bon travail philosophique.
Si, au contraire, la réfutation ne vous semble pas convaincante, elle sera elle-même réfutée : traitez-la comme une idée de la thèse opposée.
Votre plan ne doit compter que deux ou, mieux, trois parties. Chacune d’elles doit comporter entre trois et cinq sous-parties, c’est-à-dire trois à cinq idées secondaires qui argumentent en faveur de la thèse principale. Si une partie en comporte plus, tâchez de reclasser vos idées afin qu’elles soient à peu près harmonieusement disposées ; au besoin, créez une troisième partie ou bien gardez une idée un peu forte pour la conclusion. Vous pouvez aussi regrouper des idées en une seule.
Le plan par étapes est séduisant pour le correcteur, car il s’aperçoit dès l’introduction que vous avez tenté d’articuler votre travail comme un véritable raisonnement ; immédiatement, il a le sentiment que vous n’avez pas cherché la facilité.
Les parties sont des étapes d’un raisonnement ; elles sont meilleures encore si vous les articulez selon des problématiques secondaires qui s’intègrent dans la problématique générale du sujet.
Pour le sujet « La beauté s’explique-t-elle ? », le plus simple serait apparemment d’opposer les thèses « la beauté s’explique » et « la beauté ne s’explique pas » entre elles. Un plan par étapes pourrait par exemple être le suivant :