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Montesquieu : l'Esprit des lois

Les hommes sont soumis à de multiples lois de différents ordres, des lois de la nature physique aux lois de l’État, des lois du droit naturel aux lois de la religion. On donne certaines lois à un État en fonction d’un certain esprit: c’est l’esprit des lois, dont Montesquieu cherche à montrer le principe.

1. L’esprit général d’une nation

A. Les lois

Les mœurs sont les coutumes de la conduite intérieure, les manières celles de la conduite extérieure des hommes. Elles se ­distinguent des lois, qui règlent la conduite du citoyen, non de l’homme. L’esprit d’une nation* dicte son comportement naturel; il ne se change pas sans tyrannie par des lois, il faut le réformer par l’exemple. Les lois doivent être relatives à cet esprit.

Le droit civil règle les rapports entre les citoyens; le droit politique, entre gouvernants et gouvernés. Le droit politique doit s’aligner sur l’esprit d’une nation, et le droit civil sur le droit politique.

B. Les gouvernements et leurs principes

Le rapport entre gouvernants et gouvernés, c’est le gouvernement. Il en existe trois types: républicain, monarchique, despotique*. le gouvernement républicain est une aristocratie lorsque c’est une partie du peuple qui gouverne; une démocratie, lorsque c’est tout le peuple. De la nature du gouvernement dépendent des lois fondamentales qui en déterminent les règles. Des lois fondamentales (droit politique) dépendent toutes les autres lois (droit civil).

Comme il y a trois natures de gouvernement, il y a aussi trois principes de gouvernement, c’est-à-dire trois types de passions humaines qui le meuvent principalement. La république s’appuie sur la vertu, la monarchie sur l’honneur, le despotisme sur la crainte. Qu’un principe règne sur un État ne signifie pas qu’on n’y trouve pas les autres. La vertu (ici politique), c’est «l’amour de l’égalité»; l’honneur, c’est la volonté de tenir son rang.

2. Les gouvernements modérés

A. La liberté

Un homme libre est un homme qui pense l’être; non pas qu’il ne le soit pas effectivement; mais Montesquieu n’a pas la prétention de définir la liberté d’un homme contre ce que lui-même en pense. Ainsi, les Moscovites jugèrent Pierre le Grand tyrannique, qui les contraignit à couper leurs longues barbes.

«La liberté politique, dans un citoyen, est cette tranquillité d’esprit qui provient de l’opinion que chacun a de sa sûreté.» Les hommes sont libres lorsque les lois les protègent de tout arbitraire, et qu’ils savent la constance du gouvernement qui les règle: «La liberté est le droit de faire tout ce que les lois permettent» et, faut-il ajouter, l’assurance que personne ne fera ce qu’elles défendent de faire.

La liberté n’est donc pas l’apanage des républiques, puisque les monarchies sont aussi réglementées. Seuls les gouvernements modérés, c’est-à-dire tempérés par des lois, font la liberté politique.

B. Les trois pouvoirs

Tout pouvoir s’exerce jusqu’à ce qu’il ait trouvé ses limites; pour garantir la liberté dans un gouvernement modéré – c’est-à-dire soumis à des lois –, il faut encore limiter le pouvoir.

Montesquieu distingue trois pouvoirs: la puissance législative, qui est celle de faire les lois, la puissance exécutrice du droit civil – appelé aujourd’hui pouvoir judiciaire –, et la puissance exécutrice du droit politique intérieur et extérieur – pouvoir de police, pouvoir de ­ l’armée.

Pour que la modération d’un gouvernement assure aussi la liberté de ses citoyens, il ne faut pas que le monarque décide des lois qu’il exécute; le juge, des lois qu’il applique, ou de l’exécution des lois qu’il a appliquées. Réunir ces pouvoirs, c’est laisser la possibilité d’une tyrannie que les citoyens puissent craindre; or leur liberté, c’est l’opinion qu’ils ont de leur sûreté. Montesquieu est le fondateur de ce que l’on appelle la théorie de la séparation des pouvoirs.

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