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Descartes

1 Galileo Galilei justifie le doute de Descartes

René Descartes est un philosophe français ayant écrit au XVII-ème siècle. Sa pensée a influencé durablement la philosophie mais aussi le mode de réflexion français.

Tout d'abord, revenons sur l'origine de la pensée de DESCARTES.

La sensibilité a été longtemps considérée comme le moyen privilégié de connaître le réel. C'est ce que va ébranler la pensée de DESCARTES.

Mais, pour comprendre l'intégralité de son raisonnement, il convient de rappeler les influences majeures d'une telle pensée. DESCARTES s' inscrit dans la lignée directe des scientifiques qui lui sont contemporains.

COPERNIC (1473-1543), moine polonais, dénie à la Terre tout rôle privilégié dans l'univers : comme les autres planètes, elle tourne autour du soleil. C'est une véritable attaque contre l'orgueil humain qui voyait dans cette terre fixe au centre de l'univers la véritable preuve de la supériorité de l'homme qui l'habite dans la Création.

Cependant, c'est vraiment avec GALILEE (début du XVII-ème siècle) , le très célèbre professeur de l'université de Pise, que cette constatation va prendre toute sa dimension. En effet, c'est grâce à la lunette télescopique, le perspicillum, qu'il observe ce que le moine polonais avait simplement déduit : la Terre tourne bien autour du Soleil, c'est ce qu'on appelle l'héliocentrisme. Il est donc clair que l'expérience immédiate, celle des sens, est trompeuse et que nous ne pouvons nous y fier.

DESCARTES partira de cette hypothèse pour aboutir lui à un doute radical, utile pour sa démonstration, pour sa méthode.

Sa devise est là :méfions-nous des sens à tout prix.

2 L'expression du doute hyperbolique

Face à ce doute, DESCARTES cherche donc à trouver ce de quoi il peut être certain.

Sa démarche va consister à qualifier de faux tout ce dont il doute : c'est ce qu'on appelle le doute hyperbolique. Qu'est-ce qu'une hyperbole ? C'est une figure de style qui signifie l'excès. L' excès même est une épreuve : celle que la pensée va en premier lieu imposer à la sensation.

" Je suppose donc que toutes les choses que je vois sont fausses ; je me persuade que rien n'a jamais été de tout ce que ma mémoire remplie de mensonges me représente ; je pense n' avoir aucun sens ; je crois que le corps, la figure, l'étendue, le mouvement, et le lieu ne sont que des fictions de mon esprit ; qu'est-ce donc qui pourra être estimé véritable ? peut-être rien autre chose sinon qu'il n'y a rien au monde de certain. "

LES MEDITATIONS METAPHYSIQUES.

Descartes affirme :

La sensation n'est pas un critère valable sur lequel fonder ma connaissance.

Mais il va me rester dans l'esprit des idées de raison, celles qui sont internes à mon esprit et qui ne me viennent pas des sens : les idées mathématiques en sont l'exemple le plus simple.

Nous venons d'apprendre deux choses : tout d'abord la sensation n'est pas un critère de vérité ; et ensuite, il est possible d'avoir des représentations de choses qui n'existent pas. Le doute consiste donc à ne pas tirer de conclusions trop hâtives, à savoir suspendre son jugement.

Descartes poursuit :

Si je remets tout en doute je me heurte à un problème méthodologique, car comment douter d'idées internes à mon esprit ? Ces idées que je n'ai jamais questionnées et qui me semblaient définitivement acquises. - Deux plus deux ne feraient-ils pas quatre, quoi qu'il arrive ?

Ne perdons pas de vue le fait que c'est avant tout un élément de recherche ; une hypothèse. Il me faut tout remettre en question pour pouvoir finalement ne dégager que ce dont je vais pouvoir être sûr.

La suite est de même logique, toujours en suivant le doute hyperbolique, il me faut dorénavant remettre en cause celui qui m'a créé puisque j'ai remis en cause le contenu de mon esprit, ce contenu vierge de toute expérience. Si ce contenue est biaisé c'est parce qu'il m'a été donné par un " DIEU TROMPEUR " ou un " MALIN GENIE ".

" Mais je me suis persuadé qu'il n'y avait rien du tout dans le monde, qu'il n'y avait aucun ciel, aucune terre, aucun esprit ni aucun corps ;ne suis-je donc pas aussi persuadé que je n'etais point ? Non certes, j 'étais sans doute si je me suis persuadé ou si seulement j'ai pensé quelque chose ; mais il y a je ne sais quel trompeur très puissant, très rusé qui emploie son industrie à me tromper toujours ; il n'y a donc pas de doute que je suis, s'il me trompe ; et qu'il me trompe tant qu'il voudra, il ne saurait jamais faire que je ne sois rien, tant que je penserai être quelque chose[…] "
LES MEDITATIONS METAPHYSIQUES, Descartes.

3 Le cogito

Descartes continue à raisonner ainsi :

Si je ne peux être sûr de rien, si mes sens me trahissent, si mes idées de raison sont, elles aussi, erronées à cause de mon créateur qui serait un " malin génie " s' évertuant à toujours me trahir, de quoi puis-je finalement être sûr ? Que reste-il donc ?

Il y a cependant quelque chose qui échappe à ce jeu d'élimination : je suis certain que j'existe dans la mesure où je pense.

C'est le célèbre COGITO cartésien, " cogito ergo sum ", le " je pense donc je suis. "

Ici le fait de penser me prouve que j'existe au moins assez pour penser ; ainsi il est clair que, si je pouvais séparer l'idée " j'existe " de son objet, mon existence réelle, je ne serais pas là pour affirmer ce " j'existe ".

Il m'est absolument impossible de séparer l'idée " je suis " de son objet qu'est mon existence réelle.

" […] Après y avoir bien pensé et avoir soigneusement examiné toutes choses : enfin il faut conclure, et tenir pour constant, que cette proposition, je suis, j'existe, est nécessairement vraie toutes les fois que je la prononce, ou que je la conçois en mon esprit. […] "

L' expérience du doute nous met en présence d'une certitude, le fait que j'existe. Le fait que je sois en présence d'une certitude me fait comprendre ce qu'est une idée claire et distincte.

En effet, ce qui caractérise le cogito c'est bien la clarté et la distinction, pas de doute que je doute, cette évidence du doute, c'est la pensée claire.

Avoir une certitude, c'est avoir une idée claire et distincte, pour le moment il n'en a aucune (à part le fait qu'il existe, mais quand il en aura une il pourra dorénavant la reconnaître car il sait à quoi elle ressemblera : le caractère de la certitude sera celui de la clarté et de la distinction : le cogito est le type même de la certitude.

"Mais je ne connais pas encore très clairement ce que je suis, moi qui suis certain que je suis : de sorte que désormais il faut que je prenne soigneusement garde de ne pas prendre imprudemment quelque autre chose pour moi, et ainsi de ne point me méprendre dans cette connaissance, que je soutiens être plus certaine et plus évidente que toutes celles que j'ai eues auparavant. "

Cette découverte ne doit donc pas être prise pour la découverte d'un " moi " psychologique ; je sais que je suis mais je ne sais pas qui je suis. La certitude d'être une chose pensante coexiste avec le doute qui continue de peser sur mes sensations. J'ai donc découvert qu'il existe quelque chose qui n'a nul besoin de l'habitude, de la foi, ou d'une autorité quelconque, c'est le fait que j'existe car je doute, mais pour le moment je n'ai pas d'autres certitudes, encore moins le fait de savoir qui je suis.

Nous avons ainsi prouvé que si la pensée peut se penser elle-même alors qu'elle a remis en cause tout ce qui vient des sens c'est qu'elle n'est pas de la même substance que les sens, elle est sans étendue, sans matière, sans dimension. L'âme est en conséquence plus facilement connaissable que le corps.

4 Pour retrouver d'autres certitudes il nous faut lever l'hypothèse du "malin génie"

Pour prouver que Dieu n'est pas trompeur, il lui faut prouver qu'il existe.

On ne peut avoir une idée d'une chose sans la connaître, la majorité de mes idées sont causées par des éléments en dehors de moi dont j'ai pris connaissance par les sens. Cependant, il est clair qu'une idée ne peut avoir plus d'être dans l'effet que dans la cause ; moi être fini je ne peux avoir plus de cause que l'infini. Il est ainsi clair que Dieu existe car d'après ce que nous avons dit il ne peut être causé par mon esprit : c'est la preuve ontologique.

Maintenant qu'il est acquis que Dieu existe, il me suffit de prouver qu'il n'est pas trompeur pour pouvoir avoir la garantie que mon esprit sera un outil fiable dans ma quête de certitudes. L'idée de Dieu est celle d'un être infiniment plein de tout alors que dans la tromperie ou la malice se trouve l'idée de néant, ce qui est assimilé à un manque d'être.

Il s'agit là d'une antinomie irréconciliable, il y a une contradiction dans les termes ; puisque nous avons précédemment prouvé que Dieu existait, il ne peut pas être trompeur.

Je requalifie ainsi l'idée de Dieu et par là même les idées innées de type mathématique.

Mes idées peuvent être répertoriées en trois classes :

  • Les idées innées, la marque du Créateur sur sa Création, celles mises en moi au départ avant l'expérience (la notion d'étendue par exemple en fait partie la hauteur, la profondeur, ces idées avec lesquelles je suis né. )
  • Les idées adventices qui sont celles qui me viennent des sens.
  • Les idées factices (idées que crée mon imagination).

Grâce à cette démonstration, il est clair que nous pouvons nous fier à nos idées de raison et qu'ainsi l'homme pourra diriger son esprit dans les sciences :
" NOUS ALLONS POUVOIR NOUS RENDRE COMME MAÎTRES ET POSSESSEURS DE LA NATURE. "

C'est une forme de loi-programme que Descartes va donner à l'homme pour qu'il puisse mener à bien ses réalisations techniques. L'homme a pris conscience du pouvoir de sa pensée ; quels phénomènes pourraient résister désormais à l'intelligence des hommes ? La science peut dorénavant partir à la conquête de la nature et du monde.

L'illustration la plus connue de la sûreté de l'esprit humain est celle du morceau de cire.

5 L'exemple du morceau de cire

Lorsque je vois un morceau de cire, il m'est possible de l'identifier très nettement. Il semblerait que j'aie d'emblée affaire à une connaissance vraie. Cependant si j'approche ce morceau de cire du feu, il ne m'est plus possible de l'identifier comme étant un morceau de cire alors que ses qualités intrinsèques restent les mêmes. Donc, même si malgré ce changement radical, je sais que je suis toujours en présence du même morceau de cire, c'est tout simplement grâce à ma raison et non pas grâce à mon observation.

Les idées de raison m'ont ici été indispensables car ce qui m'a permis de reconnaître le morceau de cire même changé, c'est une faculté qui puisse se représenter l'idée générale d'une infinité de formes possibles :seule la faculté de concevoir qui est une idée de raison, une idée innée, peut accomplir cela.

Ma connaissance provient donc non pas de ma sensation mais de ma raison.

6 Le libre arbitre ou la plus haute manifestation de la liberté de l'homme

Mais maintenant, se questionne Descartes, de quelle façon la raison doit-elle s'appliquer à la réalité pour apporter quelque chose à l'homme ? Puisque mes idées innées sont fiables, d'où me vient le fait que je me trompe souvent ?

Les idées sensibles sont composées de différents éléments, ce qui les rend confuses ; la bonne méthode à employer c'est d'analyser ces éléments en autant d'éléments clairs et distincts, afin de pouvoir les analyser sans aucun doute.

Pour bien mener mon esprit dans les sciences je ne peux procéder que si je n'ai que des idées claires et distinctes. Je saurai aussi qu'en utilisant ma raison j'aurai une certitude valable.

J'ai d'abord eu une image qui s'est avérée confuse, je me suis abstenu de juger trop vite c'est-à-dire que j'ai suspendu mon jugement : c'est un choix que j'ai fait, le choix de ne pas être indifférent à toutes les possibilités qui m'étaient offertes. Lorsque je suspends mon jugement, que j'utilise mon libre arbitre, je fais preuve du plus haut degré possible de liberté.

Ainsi la liberté ne consiste-t-elle pas à faire n'importe quoi ; elle se caractérise par l'indépendance à l'égard du déterminisme car être libre c'est essentiellement être l'auteur de son acte, ce qui suppose une connaissance des raisons d'agir et la possibilité de suspendre son libre arbitre.

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