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La vie de Beaumarchais

La démocratie doit concilier égalité et liberté

Même si l’individualisme peut conduire à un excès de liberté et à l’anarchie, Tocqueville craint surtout « la tyrannie de la majorité » car les individus lui semblent plus passionnés d’égalité que de liberté. Le risque de la démocratie est donc la soumission plus ou moins volontaire de l’individu à la volonté majoritaire. Tocqueville pense que la liberté et l’égalité peuvent se renforcer mutuellement comme aux États-Unis où le fédéralisme et la décentralisation ainsi que la vie associative permettent aux individus de s’associer librement, de participer aux différents échelons du pouvoir plus qu’en France.

« L’égalitarisme est le ressort des sociétés démocratiques, et plus l’égalité progresse, plus les inégalités deviennent choquantes et alimentent l’exigence d’égalité » résume, selon le sociologue Henri Mendras, l’idée force de Tocqueville. On l’a souvent opposé à Marx pour qui l’égalité ne pouvait venir que d’une révolution changeant le mode de production et qui dénonçait la fausse « démocratie bourgeoise ». Si l’expérience du « socialisme réel » n’a pas donné raison à Marx, la montée actuelle des inégalités dans les démocraties autorise à s’interroger sur la thèse de Tocqueville.

Beaumarchais dramaturge

Dans le tourbillon de ses activités innombrables, Beaumarchais a trouvé le temps de composer des pièces fort diverses. À partir de 1760, il écrit plusieurs parades, pièces brèves et très libres, bouffonnes et licentieuses, dont l’inspiration et la manière se retrouvent parfois dans les comédies ultérieures. Citons entre autres Les Bottes de sept lieues et Jean-Bête à la foire. Ses deux drames larmoyants, Eugénie ou la Vertu du désespoir en 1767 et Les Deux Amis ou le Négociant de Lyon en 1770 n’ont guère de succès, mais Le Barbier de Séville et le Mariage de Figaro en 1787 finissent par percer.

Deux concepts-clés résument l’esthétique du dramaturge : la vérité et l’émotion. Le drame se veut une imitation de la nature et de la vérité des hommes, la bourgeoisie, le peuple en général. Il s’intéresse non aux caractères universels ou aux passions éternelles, mais aux conditions sociales effectives. Soucieux de naturel, le drame use donc de prose et non de vers, recourt à la pantomime*, tous ces soupirs, cris et jeux de scène capables de traduire et de communiquer l’émotion dramatique. Il fait rire ou pleurer selon les cas, parfois au cours d’une même pièce, car dans la vie, on rit et on pleure. Le drame en général, et Beaumarchais en particulier, s’intéressent beaucoup à la mise en scène, car elle contribue puissamment à la vérité et à l’émotion. Le Barbier, par exemple, abonde en didascalies*, c’est-à-dire en indications scéniques concernant le décor, les costumes des personnages, les jeux de scène. Un spectacle plus libre, volontiers moralisateur, telle est l’esthétique du drame, en tout cela opposée à celle du classicisme.

La gaieté est l’ingrédient principal des comédies de Beaumarchais. Dans Le Barbier de Séville, il croque sans pitié les personnages types qu’il met en scène ! Brid’oison, le juge abruti, Bazile, le maître de chant sournois, Bartholo, le barbon jaloux. L’intrigue rebondit quasiment de scène en scène, le dialogue est vif, les répliques enlevées. Et quand le spectateur craint une issue malheureuse au destin des héros, quelque opportune pirouette rétablit la situation. Dans Le Mariage de Figaro, la bonne humeur s’accorde à la dimension politique de la pièce. L’insolence abusive du comte est dénoncée, ses privilèges aussi. « Qu’avez-vous fait pour tant de biens ? se récrie Figaro. Vous vous êtes donné la peine de naître et rien de plus. »

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