A partir de 1547, pendant cinq ans au moins, des jeunes gens épris de culture antique suivirent les cours d'un célèbre humaniste, Dorat, principal d'un petit collège parisien de la Montagne Sainte-Geneviève, le collège de Coqueret ; parmi eux, se trouvaient Ronsard, Du Bellay, Baïf. Dorat, le maître, leur lisait les poètes grecs et latins; en même temps, il initiait ses élèves à la civilisation antique et leur apprenait à comprendre l'âme païenne ; surtout, il développait leur sens de la beauté en leur faisant partager son enthousiasme pour la pensée et la forme des chefs-d'œuvre antiques.
En 1549, un manifeste est publié sous le nom de Du Bellay. Intitulé Défense et Illustration de la Langue Française, il résume la doctrine du groupe : le poète a pour mission de servir la cause de la Beauté et de faire briller le génie national français. Tel est le programme que se donne La Pléiade, qui regroupe alors 7 membres : Joachim du Bellay, Pierre de Ronsard, Baïf, Rémy Belleau, Jodelle, Pontus de Tyard et Dorat.
Du Bellay se présente comme le théoricien du groupe. De santé médiocre, il mène une enfance triste au château de la Turmelière, en Anjou. Sa vie est marquée par un voyage à Rome dont il attendait les plus grandes joies, mais qui lui apportera la plus amère déception. Son oeuvre, d'inspiration très personnelle, se fait l'écho de cet espoir déçu et de son mal de vivre.
L'écriture, d'une grande simplicité, est le fruit d'un art éprouvé. Du Bellay est devenu le maître du sonnet : jouant subtilement sur les effets de symétrie et d'antithèse, il traduit de façon poignante son émotion. On lui doit notamment :
Chef de la Pléiade, puis poète officiel de la Cour, il poursuit une brillante carrière, soucieux de laisser à la postérité une oeuvre immortelle.
Il se fait le poète des Amours, dans une oeuvre aux formes variées, où l'édition humaniste se mêle à une expression personnelle et sincère. Il est l'auteur de :
Le premier volet du programme de la Pléiade consiste à donner au français la place qu'il mérite face au latin.
Le latin est, à l'époque, la langue des savants séduits par son universalité, sa précision, sa richesse, et rebutés par la difficulté de s'exprimer en français. Il tend également à devenir la langue des artistes avec l'épanouissement d'une littérature néo-latine, inspirée de Virgile, Catulle, Horace.
Les poètes de la Pléiade entreprennent donc de réhabiliter le français, en argumentant que c'est à l'usage qu'une langue s'enrichit. Il convient donc de l'employer plus fréquemment et dans des domaines plus nombreux, afin de lui permettre de s'enrichir et de s'imposer face au latin.
Le français est au XVIème siècle comme une langue pauvre. Il convient donc de l'enrichir pour lui donner plus de précision, davantage de nuances. Pour ce faire, plusieurs moyens sont disponibles :
Une autre ambition de la Pléiade est de créer un langage poétique nettement distinct du langage prosaïque. Du Bellay prône un langage orné :
Le second objectif de la Pléiade est de donner à la langue française une grande littérature qui témoigne du génie national français. Pour ce faire, le génie, l'inspiration sont nécessaires au poète, mais non suffisants. Ce n'est qu'à force de travail, de lectures ou de méditations que le poète peut prétendre au Beau. La poésie est un métier, qui ne supporte pas l'improvisation.
Le poète se doit de soigner tout particulièrement :
La Pléiade condamne les genres du Moyen-age, tels que rondeaux et ballades, qui, dit-elle, corrompent notre goût. En revanche, elle approuve les petits genres antiques (élégie, satire, épigramme...) et recommande les grands genres antiques : Ode, Tragédie, Comédie et, surtout, Épopée.
Du Bellay recommande de suivre l'exemple des Italiens en s'inspirant des anciens qui nous ont ouvert la voie vers la perfection. Imitation, toutefois, ne signifie pas traduction. Il s'agit plutôt de s'imprégner des auteurs, de faire siennes leurs pensées, leurs sentiments, leurs tournures de style, de sorte qu'ils viennent spontanément sous la plume du poète, dans le feu de sa propre inspiration.