Maximes de la Rochefoucauld
Résumé et commentaire
François VI, prince de Marcillac (1613-1680), duc de La Rochefoucauld, est le rejeton d’une
illustre lignée. Son éducation le destine à la carrière des armes et aux équipées chevaleresques.
Il s’engage en effet, et ayant fait ses premières armes en Italie, il fait alliance avec les grands
seigneurs qui s’opposent à Richelieu. Ses imprudences lui valent quelques jours à la Bastille, et
un exil forcé en sa province. Après la mort de ce ministre, la faveur nouvelle de Mazarin auprès
de la régente le jette dans la Fronde en 1648, où il rejoint le camp du prince de Condé et la
duchesse de Longueville. Il se bat vaillamment, en vain. Il doit se retirer de la lutte, blessé,
vaincu, et presque aveugle. Il se rallie finalement au roi, mais c’est un homme mélancolique,
ayant perdu ses illusions avec ses ambitions. Son aigreur se ressent encore dans ses Mémoires
et surtout dans les Maximes : on en composait par jeu, au salon de la marquise de Sablé. Les
siennes sont si dures que Mme de La Fayette lui demanda de les adoucir quelque peu.
Les Réflexions ou sentences et maximes morales sont un recueil de pensées brèves et de brillantes
formules, où l’auteur, sans illusion sur l’Homme et sur la société, s’attache à démasquer faux-semblants,
gloires et vanités. Moraliste sévère, philosophe pessimiste, il puise ses principes dans le jansénisme*
et dans le stoïcisme*, mais surtout dans l’observation peu flatteuse de ses contemporains. Il démystifie
la plupart des vertus : « Nos vertus ne sont le plus souvent que des vices déguisés », « la magnanimité
méprise tout, pour avoir tout », « il y a de méchantes qualités qui font de grands talents ». Il se
moque des femmes, du mariage et de l’amour : « il y a peu de femmes dont le mérite dure plus que la
beauté », « ce qui fait que les amants et les maîtresses ne s’ennuient point d’être ensemble, c’est
qu’ils parlent toujours d’eux-mêmes », « il y a des gens qui n’auraient jamais été amoureux, s’ils
n’avaient jamais entendu parler de l’amour », « il y a de bons mariages, mais il n’y en a point de
délicieux ». Et il en tire une sagesse personnelle : « qui vit sans folie n’est pas si sage qu’il
croit », « peu de gens savent être vieux », « le soleil ni la mort ne se peuvent regarder fixement ».
La concision, les comparaisons, les images, les raccourcis participent d’une esthétique du sublime,
qui met en pièces le faux idéal de l’honnête homme et du courtisan. Telles, les Maximes de La
Rochefoucauld ressemblent à des pointes de feu et de lumière dans un froid monument de glace.
