L’épreuve orale de français au baccalauréat comporte une explication de texte suivie d’un entretien. D’une durée de 20 minutes (plus 20 minutes de préparation), elle porte sur les textes étudiés en classe durant l’année de première (œuvres complètes et groupements de textes).
Remarque : Une œuvre complète est une œuvre étudiée dans son intégralité, un groupement de textes est un ensemble de 5 à 7 textes centrés autour du même thème.
Votre professeur se chargera d’élaborer la liste des œuvres et des textes étudiés pendant l’année scolaire.
C’est cette liste que vous présenterez à l’examinateur à l’oral.
Remarque : Il se peut que l’examinateur vous laisse choisir le texte, mais n’y comptez pas trop ! De toute manière, si vous êtes autorisé à choisir, l’évaluation de votre prestation sera plus sévère…
La première partie de l’épreuve orale consiste en une « lecture d’un court passage (une quinzaine de vers ou une quinzaine de lignes de prose) tiré de la liste des œuvres et des textes présentés par le candidat. Il peut s’agir de tout ou partie de l’un des textes réunis dans le cadre d’un groupement, ou d’un passage, quel qu’il soit, d’une des œuvres intégrales étudiées. Le candidat lit le texte à haute voix. Il l’examine méthodiquement. Il propose, en se fondant sur des remarques précises, un jugement motivé sur ce qui en constitue à ses yeux l’intérêt ».
En pratique, que retenir ?
Nous allons voir à présent comment procéder.
Il existe deux méthodes pour l’explication de texte orale : l’explication linéaire et la lecture méthodique. Chacune suit des règles précises qui permettent l’examen méthodique du texte. Le tableau ci-dessous présente les deux méthodes et les étapes qu’elles comportent.
« Examiner méthodiquement un texte », c’est donc l’expliquer en appliquant l’une des deux démarches ci-dessus. Mettre en œuvre une explication linéaire ou une lecture méthodique suppose par ailleurs la maîtrise :
Nous nous appuierons sur les exemples suivants :
Il parla avec une certaine verve hâbleuse, excité par le vin et par le désir de plaire, il raconta des anecdotes de régiment, des traits de la vie arabe, des aventures de guerre. Il trouva même quelques mots colorés pour exprimer ces contrées jaunes et nues, interminablement désolées sous la flamme dévorante du soleil.
Toutes les femmes avaient les yeux sur lui. Mme Walter murmura de sa voix lente : « Vous feriez avec vos souvenirs une charmante série d’articles. » Alors Walter considéra le jeune homme par-dessus le verre de ses lunettes, comme il faisait pour bien voir les visages. Il regardait les plats par-dessous.
Forestier saisit le moment :
« Mon cher patron, je vous ai parlé tantôt de M. Georges Duroy, en vous demandant de me l’adjoindre pour le service des informations politiques. Depuis que Marambot nous a quittés, je n’ai personne pour aller prendre des renseignements urgents et confidentiels ; et le journal en souffre. »
Le père Walter devint sérieux et releva tout à fait ses lunettes pour regarder Duroy bien en face. Puis il dit : « Il est certain que M. Duroy a un esprit original. S’il veut bien venir causer avec moi, demain à trois heures, nous arrangerons ça. »
Puis, après un silence, et se tournant tout à fait vers le jeune homme :
« Mais faites-nous tout de suite une petite série fantaisiste sur l’Algérie. Vous raconterez vos souvenirs ; et vous mêlerez à ça la question de la colonisation, comme tout à l’heure. C’est d’actualité, tout à fait d’actualité, et je suis sûr que ça plaira beaucoup à nos lecteurs. Mais dépêchez-vous. Il me faut le premier article pour demain ou après-demain, pendant qu’on discute à la Chambre, afin d’amorcer le public. »
Mme Walter ajouta, avec cette grâce sérieuse qu’elle mettait en tout et qui donnait un air de faveurs à ses paroles :
« Et vous avez un titre charmant : Souvenirs d’un chasseur d’Afrique, n’est-ce pas, monsieur Norbert ? »
Le vieux poète, arrivé tard à la renommée, détestait et redoutait les nouveaux venus. Il répondit d’un air sec :
« Oui, excellent, à condition que la suite soit dans la note, car c’est là la grande difficulté ; la note juste, ce qu’en musique on appelle le ton. » Mme Forestier couvrait Duroy d’un regard protecteur et souriant, d’un regard de connaisseur qui semblait dire : « Toi, tu arriveras. » Mme de Marelle s’était, à plusieurs reprises, tournée vers lui, et le diamant de son oreille tremblait sans cesse, comme si la fine goutte d’eau allait se détacher et tomber.
Tenez, Marianne, me disait-elle, à votre place, je sais bien comment je ferais ; car, puisque vous ne possédez rien, et que vous êtes une pauvre fille qui n’avez pas seulement la consolation d’avoir des parents, je prendrais d’abord tout ce que M. de Climal me donnerait, j’en tirerais tout ce que je pourrais : je ne l’aimerais pas, moi, je m’en garderais bien ; l’honneur doit marcher le premier, et je ne suis pas femme à dire autrement, vous l’avez bien vu ; en un mot comme en mille, tournez tant qu’il vous plaira, il n’y a rien de tel que d’être sage, et je mourrai dans cet avis. Mais ce n’est pas à dire qu’il faille jeter ce qui nous vient trouver ; il y a moyen d’accommoder tout dans la vie. Par exemple, voilà vous et M. de Climal ; eh bien faut-il lui dire : Allez-vous en ? Non, assurément : il vous aime, ce n’est pas votre faute, tous ces bigots n’en font point d’autres. Laissez-le aimer, et que chacun réponde pour soi. Il vous achète des nippes prenez toujours, puis qu’elles sont payées ; s’il vous donne de l’argent, ne faites pas la sotte, et tendez la main bien honnêtement, ce n’est pas à vous à faire la glorieuse. S’il vous demande de l’amour, allons doucement ici, jouez d’adresse et dites-lui que cela viendra ; promettre et tenir mène les gens bien loin. Premièrement, il faut du temps pour que vous l’aimiez ; et puis, quand vous ferez semblant de commencer à l’aimer, il faudra du temps pour que cela augmente ; et puis quand il croira que votre cœur est à point, n’avez-vous pas l’excuse de votre sagesse. Est-ce qu’une fille ne doit pas se défendre ? N’a-t-elle pas mille bonnes raisons à dire aux gens ? Ne les prêche-t-elle pas sur le mal qu’il y aurait ?
Pendant quoi le temps se passe, et les présents viennent sans qu’on les aille chercher, et si un homme à la fin fait le mutin, qu’il s’accommode, on sait se fâcher, aussi bien que lui, et puis on le laisse là ; et ce qu’il a donné est donné pardi ! Il n’y a rien de si beau que le don ; et si les gens ne donnaient rien, ils garderaient donc tout ! oh ! s’il me venait un dévot qui m’en contât, il me ferait des présents jusqu’à la fin du monde avant que je lui dise : Arrêtez-vous !
Alors, je lui racontai brièvement et ma vie et mes espérances.
Il se mit à rire, me traita d’homme de génie, de sot, d’enfant. Sa voix gasconne, son expérience du monde, l’opulence qu’il devait à son savoir-faire agirent sur moi d’une manière irrésistible.
Il me fit mourir à l’hôpital, méconnu comme un niais, conduisit mon propre convoi, me jetant dans le trou des pauvres. Il me parla de charlatanisme. Avec cette verve aimable qui le rend si séduisant, si entraînant, il me montra tous les hommes de génie comme des charlatans, et me déclara que j’avais un sens de moins, une cause de mort, si je restais, seul, rue des Cordiers. Je devais aller dans le monde, égoïser adroitement, habituer les gens à prononcer mon nom et me dépouiller moi-même de l’humble monsieur qui messeyait à un grand homme de son vivant.
— Les imbéciles, s’écria-t-il, nomment ce métier-là, intrigue, les gens à morale le proscrivent sous le mot de vie dissipée. Ne nous arrêtons pas aux hommes, interrogeons les choses et les résultats ? Tu travailles, toi ? tu ne feras rien !
La dissipation, mon cher, est un système politique. La vie d’un homme occupé à manger sa fortune devient souvent une spéculation. Il place ses capitaux, en amis, en plaisirs, en protecteurs, en connaissances... Un négociant risque-t-il un million ? pendant vingt ans, il ne dort, ni ne boit, ni ne s’amuse, il couve son million, il le fait trotter par toute l’Europe ; il s’ennuie, se donne à tous les démons que l’homme a inventés ; puis, une faillite le laisse sans un sou, sans un nom, sans un ami. Le dissipateur lui, s’amuse à vivre, à faire courir ses chevaux ; et si, par hasard, il perd ses capitaux, il a la chance d’être nommé receveur général, de se marier, d’être attaché à un ministre, à un ambassadeur... Il a encore des amis, une réputation, et toujours de l’argent.... Connaissant les ressorts du monde, il les fait jouer à son profit. Est-ce logique, ou suis-je fou ? N’est-ce pas la moralité de la comédie qui se voit tous les jours dans le monde ?
— Ton ouvrage est achevé, reprit-il après une pause. Tu as un talent immense !... Eh bien ! ce n’est rien. Voilà le point de départ. Il faut maintenant faire ton succès toi-même, cela est plus sûr. Tu iras conclure des alliances avec les coteries, conquérir des prôneurs... Moi, je veux me mettre de moitié dans ta gloire, être le bijoutier qui aura monté ton diamant.
L’explication de texte orale fait appel à un certain nombre de compétences spécifiques que nous allons aborder ci-après.
Le texte que vous avez à expliquer est toujours extrait d’une œuvre plus longue (même s’il s’agit d’un poème, il est extrait d’un recueil poétique !). C’est pourquoi il convient de le situer. Cette première phase de l’introduction varie selon qu’il s’agit d’un texte extrait d’un groupement ou d’une œuvre complète.
Exemple : Maupassant, Bel-Ami (texte 1 p. 257)
On ne présentera pas cet extrait de Bel-Ami de Maupassant de la même manière selon qu’il est étudié dans le cadre du groupement de textes, « L’entrée dans la vie » ou de l’œuvre complète.
Un axe est une piste de lecture, un centre d’intérêt du texte, par exemple un thème-clef ou encore une particularité stylistique. Les axes (généralement 2 ou 3) s’attachent à des aspects du textes particulièrement marquants ou caractéristiques du passage : demandez-vous ce qui fait sa spécificité.
Il n’est pas nécessaire que ces axes permettent un commentaire exhaustif du texte. La lecture méthodique s’appuie en effet sur des choix de lecture.
Maupassant, Bel-Ami (texte 1, p. 257).
Nous considérerons cette fois ce texte comme un extrait d’une œuvre complète.
Marivaux, La Vie de Marianne (texte 2, p. 258).
Nous ferons de ce texte une lecture méthodique selon 2 axes :
Analyser le plan du texte consiste à faire un découpage cohérent du passage en plusieurs grandes parties pour chacune desquelles on proposera un titre. On montrera aussi comment les différentes parties du texte s’articulent entre elles.
Pour procéder au découpage du texte, on s’appuiera essentiellement sur :
Balzac, La Peau de chagrin (texte 3, p. 259).
Situation du texte : Raphaël, jeune protagoniste de La Peau de chagrin de Balzac, espère
réussir dans la vie à force de travail ; il rêve d’être un écrivain célèbre. Afin de se
consacrer entièrement à son ouvrage, il vit dans l’isolement et la pauvreté. Il rencontre
un jour un ancien ami, Eugène de Rastignac, qui est parvenu à faire fortune rapidement.
Rastignac donne une leçon d’arrivisme à Raphaël.
Plan :
Le principal écueil est ici la paraphrase. Elle consiste à répéter, moins bien que l’auteur, ce que dit le texte (bannissez les formule du type « l’auteur dit que... »).
Comment éviter la paraphrase ? En partant toujours de l’analyse formelle (lexique, syntaxe*, répétitions, antithèses*, figures* de style, versification*, rythme, etc.) pour en déduire :
Cette démarche est celle du sujet II ou commentaire littéraire. Vous pouvez donc vous référer aussi à ce chapitre. Les exercices écrits que vous ferez pendant l’année enrichiront vos compétences pour l’épreuve orale et inversement.
Voir en fin de séquence l’explication du texte 1 (p. 267) et celle du texte 2 (p. 264).
Si le texte est extrait d’un groupement : l’élargissement peut consister en une comparaison rapide avec les autres extraits.
Balzac, La Peau de chagrin, (texte 3, p. 259)
Dans cet extrait de La Peau de chagrin, Balzac joue sur le contraste entre deux figures que
l’on retrouve fréquemment dans les textes de notre groupement ainsi que dans les romans dits
de formation ou d’initiation : l’initiateur et l’initié (ou encore le maître et l’élève). Le
même couple initiateur/initié se retrouve par exemple dans le texte de Marivaux, extrait de La Vie
de Marianne : Mme Dutour et Marianne. Mais alors que Marivaux a choisi de confronter des
personnages d’âge différent (Marianne est une toute jeune fille, alors que Mme Dutour, femme
d’expérience, est d’âge mûr), la leçon de Rastignac a d’autant plus de force qu’elle est
présentée par un jeune homme du même âge que Raphaël. Le contraste entre la réussite et
l’anonymat n’en est que plus frappant.
L’examen méthodique d’un texte littéraire s’organise selon la démarche suivante :
Les deux démarches sont toujours possibles, mais certains textes se prêtent mieux à une lecture méthodique (par exemple les textes n’ayant pas un plan très rigoureux), d’autres à une explication linéaire (par exemple les textes argumentatifs).
Dans la pratique, il est plus facile d’éviter l’écueil de la paraphrase en choisissant la lecture méthodique. En effet, la tentation est grande, lorsqu’on étudie le texte ligne par ligne de répéter ce que dit l’auteur et non d’analyser. La réorganisation de votre discours selon les axes du commentaire dans la lecture méthodique vous oblige à prendre plus de distance !
Balzac, La Peau de chagrin (texte 3, p. 259).
Ce qui fait l’originalité et la force du texte, c’est moins le contenu (on retrouve dans les
conseils formulés ici par Rastignac des remarques qui figurent par ailleurs dans de nombreux
romans du xixe siècle centrés sur le thème de l’arrivisme) que le ton à la fois enlevé et
provocateur de l’argumentation de Rastignac. En choisissant l’explication linéaire, on risque,
soit de passer sous silence cette dimension essentielle du texte, soit de se perdre dans des
redites. La lecture méthodique permet une démarche plus habile, qu’illustrent les deux axes de
lecture proposés ci-dessous :
Vous aurez à prendre en note une explication de texte en deux occasions différentes :
En classe, lors de l’étude des textes :
À l’examen, lors des 20 minutes de préparation : Les notes prises lors de l’examen vous serviront à présenter oralement votre explication. Elles ne doivent pas être rédigées (vous risqueriez de lire l’explication, au lieu d’exposer votre analyse) mais mettre en évidence les éléments-clefs du commentaire. Elles doivent être claires, aérées, lisibles. Elles peuvent se présenter de la manière suivante :
Notes d’explication de texte, Marivaux, La vie de Marianne, (texte 2, p. 258).
La prise de notes pendant l’année :
La prise de notes à l’examen :
Remarque : Abréviations et signes : la prise de notes est un acte personnel. Personnalisez votre prise de notes en créant vos abréviations et vos signes.
La lecture à haute voix du texte que vous allez expliquer est une phase très importante de votre prestation orale : il ne faut donc ni l’oublier, ni la négliger.
Dans l’introduction, immédiatement après la présentation de l’extrait et avant d’annoncer vos axes de lecture.
Remarque : Ne commencez pas d’emblée par la lecture, le texte doit d’abord être présenté !
Par la lecture du texte, vous devez montrer à l’examinateur que vous avez bien compris le contenu du passage, sa structure et ses enjeux. Une bonne lecture est déjà une forme d’interprétation et donc d’explication.
Attention : n’en faites pas trop, votre lecture doit rester sobre. Pas d’élans de voix et d’excès de lyrisme !
Remarque : L’examinateur interrompra peut-être votre lecture : ne vous en inquiétez pas. Les textes sont parfois longs et il peut vouloir gagner du temps pour l’explication et l’entretien.
Vous aurez, pendant 15 à 20 minutes, pris des notes d’explication de texte. Ces notes doivent vous permettre de présenter et de commenter oralement le texte pendant 10 minutes environ.
Attention : il ne faut pas lire vos notes, mais construire un discours organisé et cohérent à partir de ces quelques repères !
Si nous reprenons l’exemple du passage extrait de La Vie de Marianne (texte 2, p. 258) et le canevas de prise de notes ci-dessus, vous pourriez tenir le discours suivant (Axe 1, point 1).
« La Vie de Marianne est un roman, mais Marianne utilise tout son savoir-faire de dramaturge (ou d’auteur de théâtre) pour faire parler la lingère, donc pour introduire un effet de réel. Certes, la langue employée est soutenue, comme en témoigne la présence d’une argumentation rigoureuse qui développe une véritable rhétorique de l’argumentation… »
N’oubliez pas que l’examinateur vous interrompra peut-être pour poser une question, demander une précision, ou recentrer votre analyse. Cette interruption ne doit pas vous faire perdre le fil de votre discours. Prévoyez des repères suffisamment clairs sur votre brouillon pour pouvoir vous y retrouver à quelque moment de l’explication que ce soit. Mettez en valeur (soulignement, surligneur fluorescent) les grandes étapes de votre prise de notes !
Lisez avec attention l’explication de texte ci-dessous et repérez, au fil de cette lecture, les compétences que nous venons d’examiner.
Maupassant, Bel-Ami (texte 1, p. 257)