En 1886, Guy de Maupassant publie Bel-Ami, un roman demeuré célèbre. L’histoire est assez simple, au fond, même si l’intrigue est plutôt complexe. C’est un roman d’apprentissage qui raconte l’ascension sociale spectaculaire et insolente d’un jeune homme surnommé Bel-Ami.
Georges Duroy, le héros du récit, est un homme d’origine et d’instruction modestes, mais vif, et plein de charme. Sous-officier en Afrique, il vient vivre à Paris. Il y rencontre un ami journaliste, Charles Forestier, et s’introduit ainsi dans le métier. Madeleine, la femme de Forestier, Walter, le patron du journal, ses filles même, sont également charmés. Il pousse l’élégance jusqu’au duel, qui accroît son prestige. Les progrès accomplis incitent Bel-Ami à poursuivre dans cette voie, avec plus de méthode, et moins de scrupule désormais. Après la mort de Forestier, Bel-Ami épouse Madeleine, et réussit à capter une partie de son héritage. Il séduit Suzanne, la fille de son puissant patron, réussit à répudier Madeleine, fait tomber un ministre, enlève la jeune fille, et abandonne sa mère à la folie.
Bel-Ami est donc le héros du roman, un homme avisé qui comprend assez vite, mieux encore que le Rastignac de Balzac, comment fonctionnent les rouages de la société. Le charme, les circonstances, l’opportunisme, l’arrivisme bientôt, aiguisent sa cupidité, sa fourbe et son cynisme cruel, finalement. En tout cela, au fond, il ne fait que jouer le jeu, un peu mieux que d’autres, c’est là son seul péché, qu’une société corrompue l’invite à pratiquer.
Les épisodes se succèdent pour évoquer l’irrésistible ascension sociale du héros, qui trompe et séduit hommes et femmes à tour de bras. Par cette peinture de mœurs, l’auteur met en scène les liaisons dangereuses d’une société bourgeoise aussi décadente que l’aristocratie à laquelle elle succède. Surtout, Maupassant propose une virulente satire* d’un « certain journalisme » et de « certains milieux » parisiens, de la presse et de la politique.
École des ambitieux, manuel de l’arriviste, ce livre, brillant et trouble tout à la fois, témoigne du pessimisme et de la lucidité de son auteur.