Andromaque
1:Analyse dramatique
Cette tragédie en cinq actes et en vers connut, dès sa création en 1667, un énorme succès.
L’histoire, qui se déroule aux lendemains de la prise de Troie, peut être résumée selon la
fameuse formule : Oreste aime Hermione, qui aime Pyrrhus, qui aime Andromaque, qui ne l’aime
pas. L’intrigue est un peu plus complexe malgré tout. Du côté troyen, Andromaque, la veuve
d’Hector, captive de Pyrrhus, tente de protéger son fils Astyanax ; du côté grec, les chefs
s’impatientent et envoient Oreste pour réclamer à Pyrrhus la mort d’Astyanax, dernier reste
d’un sang illustre. Entre les deux, Pyrrhus, aimé d’Hermione, amoureux d’Andromaque, promet
de sauver Astyanax si Andromaque consent à l’épouser. Celle-ci cède au chantage, résolue
toutefois à se donner la mort après l’hymen, pour rester fidèle à la mémoire d’Hector.
Hermione, d’une jalouse rage, engage Oreste qui l’aime à tuer ce rival, mais le lui reproche,
sitôt le sang versé. Elle court se tuer sur le cadavre de Pyrrhus, et Oreste sombre dans la
folie.
2:Terreur et pitié
Andromaque, le premier grand succès de Racine, est un heureux mélange de violence tragique
et d’élégie* romanesque*. L’auteur emprunte à la légende homérique, au tragique grec Euripide,
et au poète latin Virgile, mais il adapte ses sources à la mode et au goût de la cour. La
couleur tragique de la pièce éclaire la fureur des personnages. La jalousie d’Hermione condamne
son amant et la pousse au suicide. La passion d’Oreste le conduit au meurtre et à la folie. Le
désir de Pyrrhus tyrannise Andromaque. Qui aime souffre, et fait souffrir, telle est la règle
en cette tragédie.
Mais l’âpre violence est amortie par la beauté lumineuse du personnage d’Andromaque. Déchirée
entre sa fidélité au souvenir d’Hector et son souci du salut d’Astyanax, elle est douleur et
poésie, « captive, toujours triste ». Sa lutte pathétique, servie par l’harmonie des vers de
Racine qui, à chaque personnage, donne les mots conformes à sa passion, fait de la tragédie un
espace nouveau de terreur et de pitié.
