Les Amours font de Ronsard le poète lyrique* par excellence. Son inspiration s’y déploie autour de trois femmes qu’il célèbre par ses chants, Cassandre, Marie, puis Hélène.
En 1552, Ronsard publie un recueil de sonnets* d’Amours, dans la tradition du Canzoniere du poète italien, Pétrarque. Sa muse, celle qui l’inspire, sa bien-aimée enfin, a pour nom Cassandre, la jeune Salviati qu’il a un jour rencontrée à Blois. Mais ce nom poétique se confond de manière exquise avec celui de la triste princesse de Troie, la prophétesse Cassandre. De là maintes rêveries, où s’exalte le goût du poète pour une mythologie somptueuse ou précieuse, érotique et maniériste. Le culte de la femme, adulée, blasonnée, déifiée, s’ancre dans une pensée où la cosmologie* et le néo-platonisme ont une large part, mais il laisse aussi place à une inspiration quelquefois plus mignarde ou ironique. À travers ses riches figures, comparaisons, métaphores*, antithèses, et dans le cadre strict du sonnet*, Ronsard met en scène son art d’aimer et son art poétique* qu’il célèbre à la fois.
La Continuation des Amours en 1555 et la Nouvelle Continuation l’année d’après, à bien des égards, sont plutôt une rupture. L’auteur abandonne le décasyllabe et adopte l’alexandrin ; surtout, il renonce aux acrobaties, aux complexités, voire aux obscurités de l’ancienne manière, qui avaient justifié la présence du commentaire éclairé de Muret dans la réédition de 1553. Laissant le pétrarquisme, le poète chante en termes plus simples et plus naturels l’aimable paysanne, Marie Dupin, mais dans quelques autres pièces ajoutées plus tard, elle se confond avec Marie de Clèves, la défunte maîtresse d’Henri III, qui lui rappelle la jeune fille morte depuis peu.
Les Sonnets pour Hélène en 1578, consacrés aux amours du poète pour Hélène de Surgères, fille d’honneur de Catherine de Médicis, restée inconsolable après la mort de son fiancé au cours de la guerre civile, renouent quelque peu avec l’inspiration pétrarquiste, mais avec plus de naturel et surtout plus d’émotion. C’est un amour d’automne, le poète a déjà cinquante-quatre ans, et il envisage cet amour avec une noblesse familière et tendre qui cache mal son angoisse de la fuite du temps :
Vivez, si m’en croyez, n’attendez à demain :
Cueillez dès aujourd’hui les roses de la vie.