Alain Robbe-Grillet est né à Brest en 1922. Ses études le conduisent vers le métier d’ingénieur agronome, mais il s’oriente finalement vers la littérature. Avec Nathalie Sarraute, Michel Butor et Claude Simon, il apparaît comme un des maîtres du Nouveau Roman, dont il explique la théorie dans son essai Pour un nouveau roman en 1955. Il délaisse la « sacro-sainte analyse psychologique » au profit d’une approche plus phénoménologique, c’est-à-dire fondée sur la description des objets et des comportements qui apparaissent au regard et à la conscience. L’individu ne disparaît certes pas de son œuvre, simplement sa présence semble discontinue, fragmentée ou immergée dans le monde extérieur des objets, ou dans l’univers intérieur de ses fantasmes.
Dans les récits d’Alain Robbe-Grillet, les objets investis par la conscience hallucinée, deviennent des signes opaques, souvent trompeurs. Dans Les Gommes, (1953), l’enquête que mène le détective Wallas l’égare dans le labyrinthe de la ville. Le sujet du Voyeur (1955) est véritablement l’entreprise d’un regard, qui tente inlassablement de percer le mystère du monde. La Jalousie est à la fois le sentiment d’un époux obsédé et le volet à travers lequel il surveille sa femme. Avec son récit Dans le labyrinthe (1959), le romancier va encore plus loin sur la voie sans retour du délire ou de l’hallucination. Son Projet pour une révolution à New York (1970) transforme peu à peu l’expérience quotidienne en violence érotique. Enfin, Robbe-Grillet a recueilli des éléments de sa vie et de ses « régions hantées » dans un récit autobiographique, au titre évocateur : Le Miroir qui revient (1985).
Passionné par le monde des images et des objets, Robbe-Grillet s’est tout naturellement tourné vers l’art cinématographique. Il a travaillé à plusieurs films : L’Année dernière à Marienbad (1961), L’Immortelle (1963), Trans-Europ-Express (1967), L’Éden, et après (1970), Glissements progressifs du plaisir (1974). Il a lui-même expliqué sa technique : « il ne s’agit ni de refuser, ni d’exalter ces éléments, par eux-mêmes insignifiants, et qui ne prennent sens que par le montage, par les structures de jeu que l’on peut imaginer. Notre seule liberté est dans la marge de ce jeu »