Pour Tocqueville, la démocratie est d’abord une organisation sociale impliquant l’égalité des chances. Il l’oppose et la préfère à la société aristocratique dans laquelle règnent les privilèges, l’inégalité des droits et des devoirs à la naissance, l’immobilité des individus dans la hiérarchie sociale. Il défend aussi la dimension politique de la démocratie au nom de l’égalité (dans la gestion des affaires publiques) et de l’efficacité (chacun accepte les décisions qui traduisent la volonté majoritaire). Il critique néanmoins les risques du système électif qui conduit des gens inexpérimentés (risquant de se tromper) et peu fortunés (donc corruptibles) à gouverner. Pour lui, l’évolution historique montre que les principes démocratiques supérieurs aux principes aristocratiques ne peuvent que l’emporter.
L’égalisation des conditions et l’émergence des sociétés démocratiques liées et inéluctables constituent une marche en avant vers la modernité. L’égalisation n’efface pas toutes les inégalités entre riches et pauvres, mais les résorbe du fait de l’égalité juridique des droits et, surtout, de la mobilité sociale qui permet à tout individu d’accéder à n’importe quelle position sociale. Même rare, la mobilité affirmée comme un droit et revendiquée comme une valeur a une force symbolique. Elle permet aux sociétés d’évoluer et d’éviter les révolutions. Cette reconnaissance de l’égalité des droits induit le risque que l’individualisme débouche sur un égoïsme qui, selon Tocqueville, met en danger le lien social, au contraire de ce que pense Adam Smith.