Economiste anglais de l’école classique ; il a travaillé sur les questions monétaires (théorie quantitative de la monnaie) et surtout sur les échanges internationaux. Dans son principal ouvrage, Des Principes de l’économie politique et de l’impôt, publié en 1817, il explique comment combattre la baisse du taux de profit dans son pays en développant le commerce mondial. Son débat intervient dans une période où les profits des industriels sont limités par les hausses de salaires, elles-mêmes provoquées par un prix du blé élevé. Ricardo préconise donc le libre-échange qui permet par des importations de baisser le prix du blé (donc du pain et des salaires) et de restaurer les profits.
Il y a un paradoxe à penser que le libre-échange est la politique officielle menée par le GATT puis par l’OMC mais que le protectionnisme survit sous une forme cachée. Quels peuvent être les arguments des libre-échangistes ? Pourquoi échangeons-nous ? Quels intérêts y trouvons-nous ?
La théorie des avantages absolus a été développée par Adam Smith. Il a démontré dans son ouvrage (Recherches sur la nature et les causes de la richesses des nations, 1776) qu’un pays qui vend moins cher que ses concurrents un produit donné possède pour celui ci un avantage absolu. Il doit donc se spécialiser dans la production de ce bien, en vendre et acheter les autres biens dont il a besoin et pour lesquels il n’a pas d’avantage absolu. Il ne faut donc pas produire soi même ce qui est produit à un coût inférieur par d’autres. Cette théorie n’est valable que si chaque pays possède un produit au moins pour lequel il a un avantage absolu.
Dans la théorie des avantages comparatifs (pour un approfondissement voir p.85, le cours de spécialité) David Ricardo part d’un exemple plus conforme à la réalité. Beaucoup de pays produisent avec un coût supérieur à d’autres pays dans tous les domaines. Ils ne disposent donc d’aucun avantage absolu. Ricardo démontre qu’ils doivent néanmoins se spécialiser et produire en quantité le bien ou service où leur retard de coût de production est le plus faible, et, pour le pays qui dispose d’un avantage de coût de production, là où son avantage est le plus grand. Ricardo parle alors de coût comparatif. Si les pays se spécialisent ainsi et échangent leur surplus de production, ils sont gagnants. Ceci justifie la division internationale du travail.
La dotation de facteurs ou théorème HOS (du nom des économistes Heckscher, Ohlin, Samuelson). Ce théorème explique l’avantage comparatif par la dotation factorielle : chaque pays a intérêt à se spécialiser dans la production qui demande le facteur dont il dispose en abondance et à l’exporter, et à importer la production demandant son facteur rare. La conséquence devra être l’égalisation des prix des facteurs de production dans tous les pays du monde.
Le paradoxe de Leontief : dans une étude publiée en 1953, l’économiste Leontief tente une vérification de la théorie HOS en analysant la structure des exportations des États-Unis. Ceux-ci étant un pays très développé où le facteur de production le plus abondant est le capital et où le facteur travail est relativement cher, devraient exporter des biens à fort contenu en capital, mais dans son étude Leontief met en lumière que les exportations américaines sont constituées de produits plus riches en travail (facteur rare) que les importations. C’est un démenti apparent du théorème HOS. En réalité, même lorsque les exportations américaines incluent beaucoup de travail, il s’agit d’un travail très valorisé à fort contenu en recherche et développement, contenant beaucoup de « matière grise » et donc peu comparable avec le travail contenu dans les produits importés.
Tout produit suit un cycle de production. Si un pays n’a pas au départ les moyens de le fabriquer lui-même (pas de brevet), il l’importe. Dans le début des années 80, c’était le cas des magnétoscopes vendus en France et importés du Japon. Puis le pays commence à fabriquer le produit (achat de brevet ou fabrication sous licence ou coproduction). Le produit est cher au début car peu diffusé mais il se banalise bientôt quand le nombre de fabricants augmente et que le prix baisse. Il arrive un moment où le marché intérieur est saturé. Pour accroître la demande il faut viser l’exportation.
D’autres produits sont directement conçus, fabriqués et vendus à l’échelle d’une zone commerciale locale ou même mondiale. Mais aucun pays ne peut ni ne veut produire tous les biens qu’il utilise. Chaque bien se trouve être dans une phase d’un cycle : importation, production, production et exportation, puis s’il est plus rentable de fabriquer à l’étranger, délocalisation et réimportation pour satisfaire le marché intérieur ; ainsi le Japon est en phase d’importation pour ses avions qu’il ne produit pas (pas encore), d’exportation de ses motos ou de ses caméscopes, de réimportation après avoir délocalisé pour ses textiles ou ses téléviseurs bas de gamme. La logique importation, exportation, production vient ici de l’ancienneté du bien et de sa place dans le cycle.
Toutes ces théories se fondent, pour expliquer l’échange, sur l’avantage de l’offre. On exporte parce qu’on a une offre (production) compétitive qui permet dans la concurrence internationale de l’emporter sur ses concurrents. On exporte parce que les coûts de production sont différents d’un pays à l’autre, parce que les conditions de production varient. Ce type d’analyse explique relativement bien les échanges qui ont lieu entre les pays dits du Nord (pays riches) et les pays dits du Sud (pays en développement). La division internationale du travail qui en découle est la division Nord-Sud.
On distingue l’ancienne DIT de la nouvelle DIT.
L’ancienne DIT est celle qui est issue de la période coloniale et du XIXe siècle. Les pays développés exportent exclusivement des produits manufacturés, les pays en développement (anciennes colonies) exportent eux des matières premières agricoles ou minérales ou de l’énergie. C’est l’exemple d’un commerce inter-branches qui a surtout dominé jusque dans les années 70.
Depuis les années 70, on est passé à une nouvelle DIT. Certains pays en développement réunissent des conditions particulières : pays petits, ayant réussi une réforme agraire, ayant une population nombreuse, suffisamment éduquée pour travailler en usines, dans des conditions de fermeté politique (dictatures, absence de syndicats), acceptant de faibles salaires donc donnant aux entreprises un avantage comparatif de coût salarial (pas ou peu de charges sociales et absence de législation du travail). Ces pays se sont spécialisés dans des productions destinées à l’exportation. Ce furent d’abord des produits à faible valeur ajoutée, demandant peu de capital (fabrication de vêtements, montage de produits électroniques simples). Puis par une stratégie de remontée des filières, ces pays appelés nouveaux pays industriels (NPI) se sont mis à fabriquer des produits à plus haute valeur ajoutée demandant plus de capital, toujours destinés à l’exportation en s’adaptant à l’évolution de la demande mondiale. Le taux de croissance de ces pays, dont l’économie dépend totalement du commerce extérieur et du taux d’ouverture des pays développés, est très élevé d’où leur surnom en Asie de « dragons » (Singapour, Hong Kong, Corée du Sud, Taiwan) ou de « bébés tigres » pour les nouveaux NPI (Thaïlande, Indonésie, Philippines, Malaisie). D’autres NPI se situent en Amérique latine (Brésil, Mexique).
Leur économie de type extraverti (tournée vers la demande étrangère) est fragile et a connu en 1998 une grave crise de croissance. Leur industrialisation basée sur l’endettement fait que malgré un fort pourcentage de production exporté, leur balance commerciale est souvent déficitaire d’où leur fort niveau de dépendance. Les NPI de la première génération comme la Corée du Sud, devenus des pays développés, délocalisent leur production vers les nouveaux NPI car, avec le développement, le niveau de leurs salaires a monté et ils ont perdu leur avantage comparatif du départ (main-d’œuvre bon marché).
Avantages comparatifs, division internationale du travail font appel à une explication des échanges fondée sur une offre compétitive. Mais l’essentiel du commerce mondial se fait entre pays développés (cf. séquence 8). Or ces pays fabriquent avec un même niveau de productivité, des coûts salariaux proches, une dotation en facteurs de production quasi identique. On ne peut donc plus parler d’avantages comparatifs d’où les autres explications possibles des échanges internationaux.
Les échanges des pays développés représentent 70 % du commerce mondial et les échanges entre pays développés 53 %. Ce commerce concerne des produits similaires ou échanges intra-branches. C’est dire qu’à conditions de production quasi identiques entre eux, à même structure de production, à même niveau de vie entre habitants des pays dits du Nord, ce ne sont pas les avantages comparatifs qui priment mais la demande. Le premier partenaire commercial de la France est l’Allemagne parce que la structure de la demande est la même de part et d’autre du Rhin. Il y a un modèle occidental de consommation qui aboutit à utiliser les mêmes produits, les mêmes services dans tous les pays. Quand un produit français peut-il être concurrentiel sur le sol allemand ? Le niveau de coûts salariaux en France et en Allemagne étant très proche, le coût du capital de même, il parait évident que la compétitivité ne peut pas être fondée sur le prix. C’est donc sur d’autres critères (qualité, délais de fabrication, design du produit, marque déposée, innovation…) que le produit devient concurrentiel. On passe alors de la compétitivité prix à la compétitivité hors-prix. Chaque entreprise cherche à créer pour son produit ou son service une différence par rapport au concurrent pour se trouver dans une position de « pseudo-monopole » et en concurrence imparfaite.
Le commerce intra-zone s’accroît et pourtant à l’intérieur d’une zone de libre-échange les pays n’ont pas toujours le même niveau de développement. Dans l’Union européenne, union économique, le niveau des habitants de l’Europe du Sud s’élève et s’uniformise avec celui de l’Europe du Nord. L’Union européenne forme aujourd’hui un grand marché intégré où le goût du consommateur devient de plus en plus un goût européen. Les normes techniques qui définissent les produits, même alimentaires, et qui sont élaborées à Bruxelles, y contribuent largement.
Dans l’ALENA, grand marché d’Amérique du Nord comprenant États-Unis, Canada, Mexique, il n’y a pas d’objectif d’uniformisation mais simplement de mise en concurrence de produits et services par abandon des barrières douanières.
Dans l’ASEAN, association de libre-échange de 9 États d’Asie du Sud-Est qui font tous partie des pays en développement et dont certains sont des NPI, le niveau de vie est encore faible et les relations avec l’extérieur de la zone plus importantes qu’entre les pays de la zone.
Aujourd’hui, un pays qui n’appartient pas à une zone de libre-échange court le risque d’être coupé de la demande mondiale et voit sa part dans le commerce international régresser. Le commerce mondial est de plus en plus le fait de blocs régionaux qui limitent le multilatéralisme des échanges.