Les modaux, ou auxiliaires de modalité, sont en anglais d'un sens bien plus précis que les traductions françaises qu'on leur adjoint. Ainsi, lorsque le français utilise le verbe pouvoir, il convoquera selon la situation des notions telles que la permission (Puis-je ouvrir la fenêtre ?), la possibilité (Je peux courir le 100m en moins de 15 secondes), l'incertitude (Il pourrait neiger demain), etc. Là où le français multiplie les utilisations du même verbe, l'anglais, lui utilisera des structures dites modales recouvrant ces différents sens. Par l'étude de can/could ainsi que may/might, nous allons aborder ce problème spécifique.
Lors de notre premier chapitre sur les modaux, nous nous devions de rappeler les règles régissant leur construction.
Les modaux ont tout d'abord une conjugaison qui reste la même pour toutes les personnes au présent, c'est à dire qu'en d'autres termes, il ne prennent jamais le -s à la troisième personne du singulier. Ainsi on dira, he can, he must, he may, etc...
En ce qui concerne les autres temps, il est à noter que quatre modaux possèdent une forme de prétérit. Ceux ci sont could (can), might (may), should (shall), would (will). Néanmoins, il serait erroné de croire que ces formes sont les simples transpositions dans un temps passé des présents correspondants. En effet, ces formes existent par elles-mêmes, c'est à dire qu'elles peuvent prendre des colorations autres que celles de l'autre élément du couple auquel elles appartiennent. Sans nous avancer encore trop dans cette leçon, remarquons par exemple que Could you comme and pick me up at the station ? se traduira par "Pouvez-vous venir me chercher à la gare ?": c'est l'expression d'une demande polie et non la simple traduction au passé de can: "pouvoir". Pour les autres modaux possédant uniquement une forme de présent, on pourra dans certains cas utiliser des structures équivalentes que nous étudierons dans le détail dans les chapitres correspondants (e.g. le couple MUST / HAVE TO).
Enfin, les modaux sont toujours suivi du verbe à l'infinitif sans to. Il s'ensuit que l'on formera les formes progressives, perfectes ou passives en accolant au modal les infinitifs correspondants (pour celles-ci, voir respectivement les chapitres sur l'aspect progressif, l'aspect perfect ainsi que la forme passive). On aura donc:
Pour la forme interro-négative, les modaux fonctionnent comme des auxiliaires, c'est à dire qu'ils se construisent, à la différence des verbes, sans l'auxiliaire do. Ainsi les formes:
Les modaux subissent aussi naturellement des contractions que nous étudierons spécifiquement.
Précisons dans un premier point purement formel les contractions suivantes:
Nous allons maintenant voir les différentes utilisations de CAN dans un contexte de présent, l'introduction des autres temps nous conduisant dans un paragraphe suivant à l'étude de TO BE ABLE TO.
CAN est par excellence le modal exprimant la capacité. Pour définir cette notion au premier abord quelque peu abstraite, référons-nous à une des définitions du dictionnaire Robert: "Puissance de faire quelque chose". Par cette approche, nous recouvrons la plupart des notions du CAN de capacité: faculté physique ou intellectuelle de mener une action à son terme mais aussi faculté acquise. Dans tous les cas, et c'est ici le point central, CAN renvoie toujours dans cette utilisation à une qualité inhérente au sujet grammatical. Observons et commentons les exemples suivants:
De façon évidente, on se servira de cannot pour traduire la notion d'incapacité.
Le CAN de permission est la forme la plus familière pour demander une autorisation de faire quelque chose. La forme COULD est déjà plus déférente, les formes les plus polies étant celles avec MAY ou WOULD.
A l'extrême inverse, on utilisera la forme négative cannot pour signifier une interdiction dans le sens d'un refus d'autorisation.
L'emploi de CAN comme certitude est évident dans la forme cannot qui indique que le locuteur est convaincu que ce qu'il avance est faux. On emploiera COULD, de préférence à CAN, pour exprimer une quasi-certitude que l'on pourra transcrire en français par la périphrase "pouvoir (fort) bien".
Dans la mesure où la nature des actes exprimés par les verbes de perception sont involontaires, il nous paraissait difficile de ranger cette utilisation de CAN dans la rubrique de la capacité, même si le sens est très proche. Retenons qu'on utilise très souvent CAN pour conjuguer les verbes tels to hear, to see et ce de préférence à l'auxiliaire to do.
Nous avons vu uniquement les utilisations de CAN dans des structures au présent. Pour les autres temps, et lorsque l'on est en présence de la notion de capacité, il rentre en concurrence avec TO BE ABLE TO. Ainsi, dans le cadre de l'éventualité ou de la permission, il n'y a pas d'ambiguïté: on utilisera CAN ou COULD. BE ABLE TO ne concerne donc que le CAN de capacité. Les germanistes pourront à raison, dans sa forme de présent, rapprocher TO BE ABLE TO de fähig sein, etwas zu tun (être capable de faire qqch).
Dans le cas du futur en SHALL/WILL, il n'y a aucune question à se poser. Seule la forme en BE ABLE TO est utilisable. Une simple remarque morphologique suffira pour s'en convaincre: WILL ou SHALL, tout comme CAN/COULD, sont eux-mêmes des modaux. Or, on ne peut faire se succéder deux modaux. On dira donc tout naturellement:
Le problème se pose donc au prétérit. Là se confrontent pour exprimer la capacité, les deux formes COULD et WAS(WERE) ABLE TO. Il s'agit de faire extrêmement attention car les deux formes ne sont pas équivalentes. En effet, COULD est un potentiel (que l'on peut traduire par "pourrait" ou "aurait pu") tandis que WAS ABLE TO rapporte un fait réalisé (que l'on peut exprimer par la tournure "a pu"). Un exemple va nous permettre de distinguer les deux formes:
MAY et MIGHT se rapprochent, tout comme CAN/COULD, des notions recouvertes par l'unique verbe français "pouvoir".
Le concept central pour comprendre l'utilisation la plus courante de MAY/MIGHT est l'éventualité. La notion à rapprocher est celle de contingence, du latin contingere (arriver par hasard). Est donc contingent "ce qui peut se produire ou non" (dictionnaire Robert). On voit bien que cette explication nous détache totalement d'une quelconque qualité du sujet grammatical, contrairement à CAN. Dans une phrase avec MAY, on tient donc à exprimer avant tout l'incertitude de l'énonciateur quant à une contingence ne dépendant pas du sujet grammatical. On rapprochera cet emploi de périphrases constituées avec perhaps.
MIGHT prend dans cette même optique une valeur de modal distincte d'une simple forme de prétérit de MAY. On l'utilisera dans le cas d'une éventualité où la part de doute est plus élevée ou, avec un sens généralement futur, lorsque l'incertitude est combinée à un risque éventuel.
Comme nous l'avons déjà vu dans les utilisations de CAN, MAY exprime une demande plus polie que CAN ou souligne une subordination hiérarchique du demandeur. Ainsi, on utilisera de préférence MAY à la forme interrogative pour émettre une demande. Au contraire, une phrase du type "you may..." sous-entendra que l'énonciateur est clairement en position d'autorité. Notons que le MAY de permission est plus rare que le MAY d'éventualité, ce qui permettra en général de lever des ambiguïtés du type de celle de l'exemple b).
Cet emploi de MAY est très fréquent et est quasiment toujours accompagné de la conjonction BUT dans la seconde partie de la phrase. C'est un procédé rhétorique élémentaire qui permet d'accorder à son adversaire le bénéfice du doute pour ensuite affirmer son point de vue.
Ce sont des formes littéraires le plus généralement, relativement rares et emphatiques. Une bonne traduction en français, soulignant bien cette utilisation, serait une inversion du sujet comme "Puisses-tu", "Puissiez-vous", etc..
On peut récapituler ainsi ces deux aspects qu'expriment le verbe "pouvoir" en français.